Corps de la paix Américain
Corps de la paix Américain
Quarante-deux ans de présence dans les soucis des Sénégalais Le Peace corps fête, depuis hier, son 44e anniversaire, il célèbre aussi ses 42 ans de présence au Sénégal, où quinze volontaires atterrirent en avril 1963. Aujourd'hui, ils sont disséminés dans cent vingt sites où ils sont devenus un outil de développement et d'indépendance des populations-cibles.
"C'est le travail le plus dur que tu aimeras". Tel est le slogan du volontaire qui s'engage dans le Corps de la paix américain. Un "bataillon" institué le 1er mars 1961 par l'un des plus célèbres et charismatiques chefs d'Etat américains, le sénateur John Fitzgerald Kennedy, assassiné en 1968. Ce que le président américain voulait à travers le "Peace corp", c'est comme il l'a lui-même souligné, "une meilleure compréhension du peuple américain par les peuples que les volontaires aident et une meilleure compréhension par les Américains des peuples visités par les volontaires".
Ce corps fête, depuis hier, son 44e anniversaire et ce jusqu'au 5 mars prochain. Il célèbre aussi ses 42 ans de présence au Sénégal, où quinze volontaires atterrirent en avril 1963. Aujourd'hui, ils sont disséminés, de l'avis de Malcom Versel, directeur du Corps de la paix au Sénégal, dans cent vingt sites. M. Versel a d'ailleurs lui-même servi au Sénégal en tant que volontaire de 1972 à 1975. Il vivait à Ngayène Sabakh, un village des abords de Médina Sabakh. Comme dans la tradition des volontaires, il porte toujours "fièrement" le nom de Magaye Gaye. C'est dans le Ngoyane, se souvient-il, "que j'ai appris à jouer le Khalam grâce au célèbre guitariste traditionnel Sakou Dieng". Tout comme lui, l'actuel ambassadeur des Etats-Unis d'Amérique a servi comme volontaire au Burkina Faso.
La mission du volontaire dure, renseigne Malcom Versel, deux ans avec une possibilité de prolongation d'une année pour achever, comme le souligne son adjoint, le Sénégalais El Hadj Mamadou Diaw, l'exécution d'un programme.
Si, au début, les volontaires se distinguaient au Sénégal dans les activités socioculturelles, dont l'enseignement de l'anglais, comme le souligne M. Diaw, "depuis vingt ans, un autre virage a été amorcé". Ainsi, même si le socle du volontariat demeure "le brassage culturel", le Corps de la paix américain est devenu "un outil de développement et d'indépendance des populations-cibles".
En conséquence, les volontaires s'investissent dans les domaines de la santé par des soins primaires et l'éducation à la base. Pour la protection et la valorisation des ressources naturelles, ils s'activent dans l'agro-foresterie, l'éducation environnementale et, récemment, dans l'éco-tourisme. Le souci étant ici "de faire profiter les populations des retombées du tourisme, en adéquation avec les valeurs de leur terroir". Le Corps de la paix est aussi très actif dans la micro-entreprise, où il cible les groupes de promotion féminine et les associations de jeunes. Dans le domaine agricole, en relation avec l'Isra, il s'implique dans la vulgarisation et a, entre autres activités, favorisé l'agriculture urbaine par le micro-jardinage.
Mais aujourd'hui, du fait des nombreuses mutations que connaît le monde, renseigne M. Versel dit Magaye Gaye, les volontaires encadrent les populations dans les Nouvelles techniques de l'information et de la communication. Un des défis programmatiques que leur centre basé à Thiès prend à bras-le-corps. Car, dit-il, "nos interventions découlent des besoins formulés par les populations et sont en adéquation avec les plans de développement arrêtés par les autorités étatiques et locales. Au total, il s'agit pour le volontaire de travailler pour le développement avec le peuple et pour le peuple", résume Magaye Gaye.
Au Sénégal, le Corps de la paix américain est présent dans toutes les régions du Sénégal, "quand bien même, la région de Ziguinchor reste encore à couvrir. Ce qui ne va pas tarder", rassure son directeur-adjoint. Pour s'acquitter de sa mission, révèle son supérieur, le volontaire a besoin, outre d'être en bonne santé, de stabilité, de sécurité et de confiance. S'il ne perçoit pas de salaire du fait de son statut, il lui est cependant alloué un minimum pour "vivre et se réaliser", comme dit M. Diaw. Dans son lieu d'affectation, "il rencontre naturellement toutes les difficultés qui existent dans la communauté avec laquelle il vit". Pour ce qui est de l'impact du Corps, comme le relève son directeur sénégalais, "il est incommensurable". Parce que l'organisation a inspiré à la fois les Européens autant que les pays où elle évolue. Ainsi, pour la reconstruction de la Casamance, les autorités sénégalaises ont créé un corps de volontaires, tout comme pour le Service civique national. M. Diaw raconte également le cas d'anciens volontaires qui ont joint les communautés où ils servaient pour leur demander ce qu'ils pouvaient faire à l'occasion de la récente invasion acridienne, "tant ils sont devenus les ambassadeurs des populations qu'ils ont côtoyées dans l'effort et la solidarité auprès de leurs concitoyens ; sans oublier les projets qu'ils ont contribué à asseoir sur place avec elles à l'occasion de leur service". Ainsi, indique M. Versel, quand le volontaire quitte son poste pour retourner dans son pays, "il est au début semblable à quelqu'un qui a perdu quelqu'un de très cher. Il lui faut du temps pour apprendre à revivre. Cette phase passée, il fait alors naturellement profiter à ses concitoyens à la fois de son expérience sur le terrain et de sa diversité culturelle", souligne le directeur du Peace Corp au Sénégal.
En conséquence, si dans l'imaginaire populaire, on assimile le volontaire "à un espion", pour les deux dirigeants de ce corps au Sénégal, "c'est là un résidu de la guerre froide qui existait entre les Etats-Unis d'Amérique et l'ex-Union des républiques soviétiques socialistes (Urss)". Puis de marteler ensemble : "Pour servir un pays, il faut nécessairement le comprendre." Illustrant la pertinence de leur organisation, ils rappellent que, depuis l'appel de John Kennedy aux étudiants de l'Université de Michigan en 1961, plus de 175 000 volontaires ont servi dans 137 pays. De même, dans le cadre de la loi sur le Vih/Sida promulguée par le président George Bush, mille nouveaux volontaires se sont mobilisés. La présence des femmes dans le Corps tourne autour de 58 % et le taux de présence des personnes du troisième âge est à 11%. Si la moyenne d'âge y est de 28 ans, le volontaire le plus âgé a 82 ans. Depuis 1963 également, a laissé entendre M. Diaw, près de trois mille volontaires ont débarqué au Sénégal pour donner le meilleur d'eux-mêmes. En 2005, ils sont près de 8 000 à travers le monde. En Afrique, le Corps de la paix est présent dans 27 pays. Quant au taux de défection, c'est-à-dire, renseigne le directeur du Corps au Sénégal, "les volontaires qui abandonnent pour des raisons d'inadaptation ou de famille", il tourne autour de 10 %. Un taux faible certes, mais qui illustre quand même, comme le dit M. Diaw, que "tout le monde ne peut pas être volontaire".
En prélude au présent anniversaire, le Corps de la paix américain présent au Sénégal a organisé la semaine dernière des activités entre Kaolack et Karang, deux villes que séparent 91 kilomètres. Pour la semaine, chaque volontaire la rythmera dans sa communauté "et avec elle". Une rencontre est aussi prévue avec la presse sur le sujet. Ce sera au courant de cette semaine.
Alioune Badara DIALLO
